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Valérie Pécresse : «La situation des banlieues est explosive!»


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Crédit photo : Sébastien SORIANO/Le Figaro

INTERVIEW - La présidente LR de la région Île-de-France* dénonce le problème non résolu des cités. Elle évoque les menaces et propose des solutions d'urgence pour éviter le drame des émeutes de 2005. LE FIGARO. - Pourquoi la situation des cités sensibles franciliennes vous semble-t-elle explosive? Valérie PÉCRESSE. - La dernière fois que j'ai rencontré Emmanuel Macron, je lui ai dit qu'il existait une crise des banlieues masquée par celle des «gilets jaunes». La situation est explosive. 80 lycées ont été attaqués en décembre. Ces attaques étaient perpétrées par des bandes cagoulées, organisées et extrêmement violentes. Elles visaient à mettre le feu aux poubelles, aux voitures, aux lycées… Des enseignants ont été aspergés d'essence. J'ai vécu cela comme un signal d'alerte. Pour la première fois, un mouvement dirigé contre l'institution scolaire n'avait aucune revendication politique. Le seul objectif était la destruction et le chaos. Avez-vous eu le sentiment que l'autorité pouvait être dépassée par ces événements? Oui. Je me suis dit que les émeutes de 2005 pouvaient se reproduire à tout moment. Il suffirait d'une étincelle. Un lycéen est resté durant 45 minutes en urgence vitale à Saint-Ouen, suite à un tir de «Flash-ball» des forces de l'ordre. Heureusement, il s'est réveillé. Le problème des banlieues n'est en rien réglé et le gouvernement regarde ailleurs. Quelle est l'origine de cette crise? Les racines sont profondes. Partout, où il y a les plus graves problèmes, la réponse publique est la plus faible. Là où le taux de délinquance est le plus important, c'est aussi là où l'on a le moins de peines exécutées. Les juges du tribunal de Bobigny l'ont dit. Et c'est là où sont les plus grandes difficultés scolaires, qu'on a le plus de mal à conserver les enseignants. Sans lucidité, il n'y a pas de solutions. J'appartiens à la droite des solutions, celle qui ose nommer les problèmes. L'angélisme du gouvernement ne résout rien. J'ai entendu le président de la République se prononcer pour une police renforcée dans 40 zones de reconquête urbaine du pays. Mais cela ne suffira pas! En Île-de-France, j'ai 270 quartiers dit «sensibles». Mes réponses tiennent en trois mots: autorité, mixité et réussite. Pour cela, il faut rétablir l'ordre, avoir une vraie stratégie de peuplement et redonner de l'espoir en relançant l'ascenseur social. Ces trois priorités sont indissociables. Comment traduisez-vous ce triple objectif en réussite? Par un plan volontaire sur dix ans pour faire disparaître les ghettos urbains. On ne peut pas laisser concentrer au même endroit toute la détresse sociale. C'est pourquoi il faut une règle: pas plus de 30 % de logements très sociaux par quartier. Sinon, les classes moyennes s'en vont. L'ascenseur social ne fonctionne plus et les quartiers se retrouvent livrés à des phénomènes de délinquance, de communautarisme voire de radicalisation islamiste. On le voit depuis des décennies, il est temps d’agir. En tant qu'ex-ministre de droite, quelle part de responsabilité êtes-vous prête à assumer? La rénovation urbaine (Anru) a souffert d'un péché originel. Nous avons investi des milliards sans réfléchir à l'importance du rétablissement de la mixité sociale. Ripoliner les façades ne change rien à la concentration de problèmes sociaux au même endroit: plus de 60 % de HLM à Valenton, Gennevilliers ou Saint-Denis. Ces déséquilibres territoriaux ont entraîné le développement d'une économie souterraine liée aux trafics et de la délinquance avec la loi du plus fort qui remplace celle de la République. Les habitants se sentent en insécurité, ceux qui le peuvent quittent le quartier, les autres se replient en communautés. La ghettoïsation existe même dans certains quartiers de Paris, conséquence de mauvais choix urbains. Percevez-vous une progression de l'antisémitisme dans certains quartiers? Oui, le conflit israélo-palestinien a importé depuis des années ses tensions dans nos banlieues et il est de plus en plus difficile pour nos compatriotes juifs d'y vivre sereinement et en sécurité. Cela menace clairement notre cohésion nationale. Mais que dites-vous sur la politique d'immigration? Je suis pour une réduction de l'immigration, le renvoi des clandestins et l'instauration de quotas. Il faut arrêter d'aggraver le problème d'intégration. Mais stopper l'immigration ne résoudra pas les problèmes actuels des banlieues. Nous devons partir de la réalité. De nombreux Français issus de l'immigration y vivent déjà. C'est en construisant de nouveaux quartiers avec une vraie mixité sociale que l'on pourra mettre fin au communautarisme. Certains maires de gauche trouvent visiblement leur compte à cette ghettoïsation puisqu'ils continuent de demander encore plus de HLM dans leurs villes. Comment empêcher l'explosion sociale de ces quartiers? La solution est plus une question de volonté que d'argent, car partout où les maires construisent des quartiers équilibrés, les classes moyennes reviennent. Je réclame le plan «banlieues» qu'Emmanuel Macron avait refusé en estimant que la solution ne pouvait pas être trouvée «entre deux mâles blancs». Je suis une «femelle blanche» et je revendique le droit d'apporter des solutions à nos quartiers. En trois ans, j'ai lancé la construction de 42 nouveaux quartiers en Île-de-France avec un plafond anti-ghetto de 30 % de logements très sociaux. J'ai aussi déployé 3000 caméras de vidéosurveillance et relancé les écoles de la deuxième chance… À la mixité, l'autorité et la réussite, j'ajoute la laïcité. Je parle le même langage à tous, y compris nos compatriotes musulmans: la loi de la République est au-dessus de la foi. Les mêmes droits imposent les mêmes devoirs. Pourquoi, malgré votre inquiétant constat, restez-vous néanmoins optimiste? J'ai de l'espoir. Il y a une vraie dynamique entrepreneuriale et une telle volonté de réussir dans les quartiers populaires. J'engage la région sur toutes les politiques éducatives, pour réinsérer les 30.000 décrocheurs, valoriser les jeunes méritants, donner une deuxième chance à ceux qui ont échoué, doubler les microcrédits pour combattre l'économie souterraine. Je mets les réseaux associatifs en lien avec les entreprises. Il se passe de belles choses, mais il faut s'investir à fond. * Valérie Pécresse préside la région Île-de-France sous les couleurs des Républicains depuis décembre 2015. Elle est également présidente du mouvement Libres!


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